Panorama 2Broyer du noir
Nous t’avons tant aimé !
Paris, 1835. Le baron Antoine-Jean Gros présente sa dernière œuvre – Hercule et Diomède – au Salon artistique. Un sacré morceau de peinture ! Le seul problème, c’est que le genre mythologique n’est plus du tout du tout à la mode… Les critiques se lâchent, et Gros ne s’attendait sans doute pas à tant de furie. Mais pourquoi s’acharne-t-on ainsi sur lui ?
Parce que la déception est énorme : cet artiste a fait partie des peintres les plus innovants de sa génération. Son style fougueux lui valait l’admiration de tous. Les artistes romantiques comme Delacroix le considèrent même comme le précurseur de leur mouvement ! On comprend leur dépit quand Gros réalise ce tableau digne du début du siècle. Pour le peintre, pourtant, cela ne sort pas de nulle part.
Car il fut l’élève de David, un peintre "néoclassique" qui a construit sa réputation avec de grands tableaux mythologiques. Seulement, cela se passait à l’époque de la Révolution française… Il faut vivre avec son temps !
Gros ne peut cependant pas accepter cet échec cuisant : il se jette dans la Seine.
Le peintre Bordier du Bignon lui rend alors hommage en magnifiant ce suicide. Pour cela, il choisit de reprendre une composition exécutée par le défunt au début de sa carrière, durant sa fameuse période préromantique. Se donner la mort n’y aura donc rien changé, tout le monde n’a d’yeux que pour les premières œuvres du baron Gros.