Panorama 1

Propose hôtel de charme au cœur de Paris

Où l'on découvre que Rodin était un squatteur.

Nous sommes maintenant en 1908. Rodin approche les 70 ans. Invité chez son ami, le poète Rainer Maria Rilke, il découvre l’hôtel Biron, un bâtiment du 18e siècle incroyablement beau, mais aussi incroyablement en ruines.


Et pourtant… Avec ses grandes pièces inondées de lumière, et ce parc en friche si beau dans la lueur de l’automne... Rodin est sous le charme. À tel point que, le lendemain, il y pose ses valises !

Charles Berthelomier, l'Hôtel Biron, côté jardin

vers 1910

© Musée Rodin

Était-il courant de s’installer chez ses amis au début du 20e siècle ? Pas plus qu’aujourd’hui. En fait, ce splendide hôtel particulier n’est pas la propriété de Rilke. C’est la résidence bohème d’une foule d’artistes ! On y croise le poète Jean Cocteau, la danseuse Isadora Duncan et même le peintre Henri Matisse.

Auguste Rodin, Rose Beuret et Rilke dans le jardin de Meudon en compagnie de deux chiens,

© Musée Rodin, photo : Albert Harlingue

Rodin est ravi : il a trouvé l’endroit rêvé pour exposer ses œuvres et recevoir des clients. Alors, quand l’État prévoit de vendre l’hôtel à des promoteurs, l’année suivante, il ne l’entend pas de cette oreille ! Eh oui, l’âge ne l’a pas changé : Rodin reste le dur à cuire qu’il était à 25 ans.


Et les promoteurs n’ont qu’à bien se tenir, car notre sculpteur n’a pas encore dévoilé tout son jeu. Il lui reste un atout majeur pour déjouer leurs plans : ses sculptures. Il fait une proposition à l’État. Le genre de deal qui ne se refuse pas : il offre toutes ses œuvres !

Il n’y a qu’une – petite - condition à respecter… Oh, pas grand-chose. En échange de ce don très généreux, l’État s’engage à créer un musée Rodin… dans l’hôtel Biron !

Hôtel Biron, Paris,

© Agence photographique du musée Rodin - Jérome Manoukian

Et voilà ! La vente est annulée in extremis. Par ce coup de maître, Rodin a vaincu les promoteurs.


Mais les ennuis ne s’arrêtent pas pour autant. En 1911, tous les locataires sont mis à la porte ! Sauf Rodin qui s’accroche, évidemment… Jusqu’à ce que le Conseil des ministres lui accorde le droit d’y rester définitivement.


La presse est scandalisée. “le plus riche de nos sculpteurs”, disent-ils, occupe désormais la totalité de l’hôtel “aux frais du contribuable” ! Ce n’était pourtant pas cher payé pour un musée qui, depuis maintenant plus d’un siècle, fait le bonheur des amateurs d’art.