Panorama 3

Une langue sous influence

Où l’on remonte aux sources du maltais.

1966, La Valette. Dans le cadre de leurs recherches, le père Fsadni et le Professeur Wettinger ont le nez dans des archives notariales, lorsque qu’un document attire leur attention. À la fin d’un registre on ne peut plus administratif, une page dénote par sa mise en forme en strophes…


Après investigation, les deux chercheurs déterminent qu’il s’agit d’un poème rédigé au 15e siècle. Ils tiennent donc entre leurs mains le plus vieux texte littéraire écrit en maltais ancien : Il-Kantilena !

Il-Kantilena (La Cantilène), 15e siècle, Archive Notariale, La Valette (Malte)

Une pépite pour Malte, et encore plus pour l’historien Wettinger. Celui-ci cherche en effet à démontrer les origines “sémitiques” (de langue arabe) du maltais, et ce texte l’aide grandement en ce sens.

Même si Malte fait aujourd’hui partie intégrante de l’Europe, elle a aussi connu une riche influence de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient au cours de son histoire. L’île a en effet été occupée par des peuples arabes dès le 9e siècle avant notre ère, et par intermittence jusqu’à la fin du 11e siècle de notre ère, lorsque les normands de Sicile prennent le pouvoir.




Stèle funéraire de Maïmouna, 1174, marbre, Musée d’archéologie, Citadelle, Rabat, Gozo (Malte)

Malte porte les traces de cette influence dans sa langue, mais aussi dans ses villes : les ruelles tortueuses de Mdina sont l’œuvre de cette occupation. On peut d’ailleurs lire encore aujourd’hui sur de nombreuses plaques de rue de la ville "triq", ce qui signifie "chemin" ou "rue" en arabe.




Autant de vestiges qui témoignent des influences multiples ayant œuvré à Malte, entre Europe et continent africain. Une vraie richesse, dont le maltais moderne témoigne : c’est la seule langue d’origine sémitique écrite avec un alphabet latin. Et le poème découvert par nos deux chercheurs a contribué à le démontrer… Ça valait le coup de lire ce registre jusqu’au bout !