Panorama 3Voir rouge

Oh la chouchoute !

Où l’on rencontre une reine qui a ses petits préférés.

Paris, 1785. Élisabeth Vigée-Le Brun est l’une des artistes les plus en vogue à la cour de France. Portraitiste attitrée, protégée et confidente de la reine Marie-Antoinette, elle croule littéralement sous les commandes. Toute la noblesse du royaume veut se faire peindre par la jeune femme !

Élisabeth-Louise Vigée-Le Brun, Autoportrait,

1790, huile sur toile, 100 x 81 cm, Musée des Offices, Florence

Dans cette abondante production, l’un des tableaux les plus charmants est sans doute le Portrait de la Baronne de Crussol. De dos, visage tourné, la belle aristocrate tient une partition de musique. L’artiste a pris soin de peindre précisément les notes. De cette façon, on peut reconnaître Écho et Narcisse, un opéra de Gluck. Et ce détail ne doit rien au hasard…

Élisabeth-Louise Vigée-Le Brun, Portrait de la Baronne de Crussol,

1785, huile sur bois, 84 x 113 cm, Musée des Augustins, Toulouse. Photo : STC – Daniel Molinier

Car Gluck est le musicien préféré de la reine Marie-Antoinette. Il est même l’ancien professeur de clavecin de la jeune Autrichienne ! Le compositeur allemand peut se réjouir de cette situation : l’appui de la souveraine lui permet de s’installer quelques années en France. En reproduisant patiemment les notes de la partition, Vigée-Le Brun adresse donc un clin d’œil à Marie-Antoinette. Mais la peintre aurait pu choisir un autre opéra, car celui-ci est un terrible échec...

Gluck en est si dépité qu’il quitte définitivement Paris. Et parmi les nombreuses critiques que le peuple murmure à l’encontre de la "trop dépensière" Marie-Antoinette, il y a celle d’imposer la musique allemande aux Français. Tout cela va mal finir pour la reine et son époux.

Anonyme, Gluck remet à la reine Marie-Antoinette la partition de son premier opéra,

peinture sur ivoire, 7 x 9,4 cm, Finnish National Gallery, Helsinki, Finlande

Vigée-Le Brun passe également pour une flambeuse. On dit que ses soirées sont les plus fastueuses de Paris. Mais elle s’en tire mieux que sa royale amie : fuyant Paris aux premiers signes de la Révolution, elle poursuit sa carrière avec succès dans toutes les cours d’Europe !

Élisabeth-Louise Vigée-Le Brun, Autoportrait au chapeau de paille,

après 1782, huile sur toile, 97,8 x 70,5 cm, National Gallery, Londres